CODE-BARRE aux Cinq Jours du Léman, fin juillet 2023

Les 5 Jours du Léman : avec toute la logistique autour de la participation à cette régate on pourrait presque l’appeler les 10 jours du Léman…

Le mercredi précédant le départ, mon fils Ganesha et moi nous nous mettons à l’œuvre au port du Nid-du-Crô. Vider le bateau, installer les couchettes spéciales qui nous permettront de dormir au vent. Vérifier le bateau, les drisses, l’accastillage et changer tout ce qui pourrait poser un problème. En effet, durant les 120 heures de régate, le bateau peut être mis à rude épreuve… Pour notre cinquième participation depuis 2014, le jeudi matin, nous nous rendons avec notre liste de matériel et de nourriture à emporter dans les commerces locaux. 36 litres de boisson, fruits, biscuits, sandwiches… sont embarqués. Nous avons remarqué par le passé que nous ne mangeons pas beaucoup. Les lyophilisés et autres conserves n’ont jamais trouvé un bon accueil. Cette année nous embarquons tout de même un paquet de pâtes étant donné que la météo paraît plutôt maussade !

L’après-midi est consacrée au démâtage. Le lendemain matin, après le grutage, nous préparons la carène et faisons un polissage de la coque. En début d’après-midi nous partons pour Vidy. Mise à l’eau du bateau, mâtage et préparations diverses. Une bouée fer à cheval et un feu à retournement doivent être installés à l’arrière… Nous terminons à 20h et retournons à Neuchâtel.

Samedi matin nous avons rendez-vous à 8h30 pour le contrôle du matériel de sécurité de l’équipement obligatoire ainsi que du tamponnage des voiles. S’ensuivent les derniers préparatifs.

Le dimanche matin, un briefing avec les tendances météo de la semaine dévoilées par Philippe Jeanneret et un dîner des équipages occupent la matinée avant le départ à 14h.

Les bateaux sortent du port dès 13h, un petit vent faiblissant nous permet de ne pas utiliser la pagaie… Un quart d’heure avant le coup de canon, un petit sud-ouest se lève et permet un début de régate dans de belles conditions.

Le départ est donné, on nous refuse un tribord à la bouée sous le vent qui impacte d’autres bateaux… Le vent forcit et la route sur Genève est agréable. Au retour, la sortie du petit lac, à la tombée de la nuit, se fait sous spi et le vent forcit régulièrement ! On passe Yvoire, le vent tourne légèrement au sud et nous voilà au vent de travers en direction du Bouveret. Nous sommes toujours dans le premier tiers de la flotte. Le bateau avance vite depuis une bonne heure, peu avant Thonon le speedo affiche 13,5 nœuds et dans la nuit, nous ne percevons pas l’état du lac derrière nous. Nous décidons d’affaler le spi. Après cinq minutes, le vent ne faiblit pas et deux bateaux nous dépassent. Nous décidons malgré les conditions de remettre le spi…

La suite de la navigation jusqu’au Bouveret est variable. Le vent a sérieusement faibli et tourne régulièrement. Enfin le passage du Bouveret vers 1 heure du matin. Les vents sont toujours irréguliers. Vers 4 heures Ganesha prend la barre et je descends dans la cabine me reposer. A peine 10 minutes plus tard, Ganesha me dit : « je pense qu’il faut que tu ressortes ». Arrivé sur le pont le vent forcit, les éclairs nous permettent de voir comme en plein jour et nous décidons de rouler le génois. Quelle bonne idée… Le vent devient violent, tout le mât tremble et la tourelle de grand-voile se disloque. On tient la GV à la main puis on la prend sur le winch du génois. L’écume s’envole et quelques vagues passent par-dessus le bateau. Le bateau à notre vent n’a pas roulé son génois, l’équipage passe un mauvais quart d’heure. Une demi-heure plus tard les éléments se calment et c’est l’heure du bricolage pour pouvoir réutiliser la tourelle. Nous apprendrons plus tard que le vent a été mesuré à 96 km/h au Bouveret, que deux bateaux ont cassé leur girouette en tapant la surface de l’eau !

Toute la journée du lundi, les vents alternent entre vent modéré et vent fort. Nous passons Vidy puis Genève et faisons route sur le Bouveret. Jamais nous n’avons reçu autant d’alertes de météosuisse, prévision d’orages violents, de vent fort…

A 19 heures je n’ai dormi que 10 minutes depuis dimanche matin et Ganesha à peine une demi-heure. Les prévisions pour la nuit et la journée de mardi sont : orages violents et 4-6 Beaufort… La journée de mercredi devrait ensuite être plus calme. Nous faisons le point et décidons de renoncer à poursuivre notre route car la probabilité de dormir dans les 36 heures qui suivent est faible. Aucun regret, la décision de raison nous parait évidente.

Mardi matin, après une bonne nuit de sommeil, nous rangeons le bateau et retournons à Neuchâtel. Toute la matinée, les concurrents passent devant Vidy, certains avec un ris et le foc. Un concurrent accoste dans le port, sa drisse de GV a cédé, il tente une réparation en montant deux fois au mât, mais abandonnera par la suite. Nous assisterons encore à une bascule de vent soudaine et puissante qui couche les bateaux devant le port. Un vent de 80 km/h a encore été vécu par deux fois au Bouveret et à Genève… 5 jours ou 120 heures ou 7200 minutes de lutte et de plaisir pour ceux qui ont terminé la régate. Chapeau !

Eric Jurt

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